Déclaration de Yajxonax - française
Aujourd'hui, 12 octobre 2024, date symbolique pour les peuples originaires de ce
territoire appelé Abya Yala, nous nous sommes réunis sur les terres de résistance de
l'isthme de Tehuantepec, à l'occasion de la Rencontre continentale : « Construire une
alliance contre les gazoducs et les autres mégaprojets et pour la défense des territoires
des peuples originaires ».
374 délégué·e·s et représentant·e·s de peuples et d'organisations autochtones,
écologistes, universitaires et journalistes, venus de 20 États de la République mexicaine,
de 22 peuples autochtones et de 11 pays, ont participé à la rencontre, dans le but
d’impulser et d’amplifier les initiatives d'articulation des peuples des Amériques.
Lors de cette rencontre continentale, nous nous sommes prononcé·e·s fermement contre
la guerre et les autres formes de violence qui sont utilisées comme mécanismes pour
piller le patrimoine de nos peuples, par l’imposition de mégaprojets. Cette violence
s'exprime de la manière la plus crue et la plus brutale contre le peuple palestinien, ainsi
que par la criminalisation des défenseurs du territoire dans tous nos pays.
Nous nous manifestons pour mettre fin à la violation des droits de la nature, et contre le
rôle des banques internationales qui financent des mégaprojets, lesquels menacent les
peuples et la nature.
Aujourd'hui, alors que nous célébrons 532 ans de résistance indigène, noire et populaire,
malgré le capitalisme sauvage et destructeur, et les innombrables tentatives d'effacer
notre culture ancestrale, la militarisation des territoires de nos pays et le faux bien-être
que les gouvernements proclament, depuis l'isthme de Tehuantepec, nous déclarons que
nous restons engagé·e·s à célébrer la vie avec dignité et rébellion.
Lors de cette rencontre, nous avons convenu de promouvoir, avec nos frères et sœurs
d'Amérique du Nord, d'Amérique centrale et d'Amérique du Sud, les efforts visant à
marcher ensemble pour défendre nos droits et nos territoires. Nous condamnons
l'imposition de mégaprojets et, en particulier, de gazoducs, tels que ceux de Tuxpan, Tula
et La Puerta del Sureste, qui causent de graves dommages environnementaux et
menacent la vie et la culture de nos peuples.
Les femmes qui participent à cette réunion, en tant que gardiennes du territoire, de la
terre et de la vie de nos peuples, expriment leur inquiétude quant à l'avenir des
prochaines générations, ainsi que la nécessité de rendre visible la douleur générée par
l'imposition et la dépossession des ressources naturelles et du territoire de nos peuples.
Nous soulignons l'importance de favoriser des relations fondées sur la sororité,
l'empathie et le soutien, ainsi que le respect mutuel avec nos camarades. Nous saluons la
lutte de nos compañeras à travers le continent qui se mobilisent pour les droits des
femmes et de nos peuples.
Il est fondamental pour nos mouvements de renforcer les actions de communication
communautaires et populaires. C'est notre défi de briser le siège médiatique par lequel
les grandes puissances cherchent à rendre nos luttes invisibles. Nous appelons donc les
porte-paroles de nos peuples à promouvoir une grande initiative de communication
continentale qui contribuera à renforcer les processus d'unité.
Nous dénonçons la promotion des programmes néolibéraux par les gouvernements de
notre continent, des gouvernements qui agissent dans l'intérêt des grandes entreprises
transnationales et qui criminalisent les défenseuses et défenseurs du territoire.
C’est pour cela que cette rencontre demande la libération de Leonard Peltier, Chef
Dhstayl (Adam Gagnon), Kenia Hernández, Tomás Martínez Mandujano, Emiliano
Zambrano Aguilar, Arnuflo García Santos, Indígena Triqui et bien d’autres encore.
Nous exigeons la justice et la réparation pour l’assasinat de Sergio Rivera, des 43
étudiant·e·s d’Ayotzinapa, de Sandra Estéfana Domínguez, de Claudio Uruchurtu,
d'Ernesto Sernas García, d'Estefania Domínguez Martínez et de bien d'autres encore.
Nous demandons que les assassins de Samir Flores, Noé Jiménez Pablo, José Santiago
Gómez, Luis Armando Fuentes Aquino, Jesús Manuel García Martínez, Félix Vicente Cruz,
Juan López, les camarades de l'Union populaire des vendeur·es·s de rue "28 de Octubre"
soient punis et que Bety Cariño et Jyri Jaakkola obtiennent justice, 14 ans après leur
assassinat.
Nous exigeons la fin des persécutions contre les compañeros et compañeras d'UCIZONI,
de Puente Madera et d'autres communautés, criminalisé·e·s pour avoir défendu leur
territoire contre le mégaprojet du Corridor interocéanique dans l'isthme de Tehuantepec.
Nous exigeons la fin de la criminalisation et du harcèlement des défenseur·se·s du
territoire contre le mégaprojet du soi-disant Train Maya, des peuples Cholulteca et des
volcans à Puebla.
Nous dénonçons également les gouvernements qui persécutent les défenseur·se·s de
l'eau et de la terre qui affrontent l'entreprise canadienne Granjas Carroll. Nous exigeons
l'annulation du mégaprojet hydroélectrique Las Cruces, Nayarit, Mexique, parce qu'il
menace les sites sacrés des peuples Naáyari, Wixarika, Odham et Meshika, et qu'il
endigue la dernière rivière libre du Mexique. La fin de la persécution et de la
criminalisation des pauvres en raison de la couleur de leur peau et de leur façon de
s'habiller, ainsi qu'un traitement équitable des migrants. Le rejet de l'utilisation de bandes
criminelles organisées pour attaquer et s'en prendre aux mouvements populaires.
Nous avons convenu de promouvoir des stratégies de prévention juridique et nous
exhortons les peuples et les municipalités à mettre en œuvre leurs propres protocoles de
consultation et à déclarer, au niveau municipal et régional, des territoires exempts de
projets miniers, d'hydrocarbures, de barrages, de parcs éoliens et industriels et de
décharges de déchets toxiques.
Nous saluons le Congrès national indigène, à l'occasion du 28e anniversaire de sa
fondation, et reconnaissons sa lutte comme la principale référence de la mobilisation des
peuples originaires du Mexique. Nous saluons nos camarades qui se mobilisent
aujourd'hui à Tepic, à Mexico, au Salvador et au Guatemala et nous reconnaissons la
solidarité de nos camarades de Suisse, d'Allemagne, de France, du Canada et des États-
Unis qui ont manifesté leur volonté d'accompagner nos luttes.
Après 532 ans de résistance indigène, noire et populaire, vive la résistance de nos
peuples, vive la lutte continentale organisée, plus une seule lutte isolée !
“ Rencontre continentale : Construire une alliance contre les gazoducs et autres
mégaprojets et pour la défense des territoires des peuples originaires”
Centre Yajxonax, Tierra Bonita, Isthme de Tehuantepec, Oaxaca, Mexique.